Les violences psychologiques au travail sont un fléau qui touche de nombreux salariés. Face à ce phénomène, le législateur a mis en place un cadre juridique visant à protéger les victimes et sanctionner les auteurs. Cet article fait le point sur la législation en vigueur et les recours possibles pour les salariés confrontés à ces situations.
Définition et reconnaissance légale des violences psychologiques au travail
Les violences psychologiques au travail recouvrent un large éventail de comportements abusifs et répétés qui portent atteinte à la dignité ou à l’intégrité psychique ou physique d’une personne. Le Code du travail reconnaît explicitement ce phénomène depuis la loi du 17 janvier 2002 relative à la modernisation sociale. L’article L1152-1 définit ainsi le harcèlement moral comme des « agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ».
Cette définition large permet d’englober diverses formes de violences psychologiques comme les brimades, les humiliations, les pressions ou encore la mise à l’écart. La jurisprudence a progressivement précisé les contours de cette notion, en reconnaissant par exemple que le harcèlement moral peut résulter d’agissements répétés même s’ils sont espacés dans le temps.
Les obligations de l’employeur en matière de prévention
La loi impose à l’employeur une obligation de sécurité vis-à-vis de ses salariés. Il doit ainsi prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité et protéger leur santé physique et mentale. En matière de violences psychologiques, cela se traduit par une obligation de prévention.
L’employeur doit notamment mettre en place des actions d’information et de formation visant à prévenir les risques psychosociaux. Il doit également évaluer les risques et les transcrire dans le document unique d’évaluation des risques professionnels. La mise en place de procédures internes permettant de signaler et de traiter les situations de violence psychologique est également recommandée.
En cas de manquement à cette obligation de prévention, l’employeur peut voir sa responsabilité engagée, même en l’absence de faute de sa part. La Cour de cassation a en effet consacré une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.
Les recours et sanctions en cas de violences psychologiques avérées
Lorsqu’un salarié estime être victime de violences psychologiques au travail, il dispose de plusieurs voies de recours. Il peut tout d’abord alerter son employeur, les représentants du personnel ou le médecin du travail. Si la situation persiste, il peut saisir le Conseil de prud’hommes pour faire reconnaître le harcèlement moral et obtenir réparation.
La loi prévoit un aménagement de la charge de la preuve en faveur du salarié. Celui-ci doit présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement. Il appartient ensuite à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs de harcèlement et qu’ils sont justifiés par des éléments objectifs. Les experts en droit du travail peuvent accompagner les salariés dans ces démarches souvent complexes.
Les sanctions encourues par l’auteur des violences psychologiques peuvent être lourdes. Sur le plan pénal, le harcèlement moral est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. Sur le plan civil, le juge peut prononcer la nullité du licenciement motivé par des faits de harcèlement et ordonner la réintégration du salarié. Des dommages et intérêts peuvent également être alloués pour réparer le préjudice subi.
L’évolution récente de la législation et les perspectives
La législation sur les violences psychologiques au travail continue d’évoluer pour s’adapter aux nouvelles réalités du monde professionnel. La loi du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail a ainsi introduit de nouvelles dispositions visant à mieux prévenir les risques psychosociaux.
Parmi les avancées notables, on peut citer l’intégration des risques psychosociaux dans le document unique d’évaluation des risques professionnels, l’obligation pour l’employeur de désigner un référent harcèlement sexuel et agissements sexistes dans les entreprises d’au moins 250 salariés, ou encore le renforcement du rôle des services de santé au travail dans la prévention de ces risques.
Des réflexions sont également en cours pour mieux prendre en compte les nouvelles formes de violences psychologiques liées au télétravail ou aux outils numériques. La question du cyberharcèlement professionnel fait notamment l’objet d’une attention croissante de la part du législateur et des juges.
En conclusion, la législation française sur les violences psychologiques au travail offre un cadre protecteur pour les salariés, tout en responsabilisant les employeurs. Si des progrès restent à faire dans l’application effective de ces dispositions, la prise de conscience croissante de l’importance de la santé mentale au travail laisse espérer une meilleure prévention et prise en charge de ces situations à l’avenir.